Là, un ressortissant chinois interpellé les valises pleines de logiciels contrefaits par les douanes de Roissy. Ici, un revendeur informatique du Sud-Ouest condamné pour avoir distribué des logiciels Microsoft contrefaits. Le piratage fait désormais partie de la vie des logiciels. Mais loin de l’image d’Épinal du particulier qui cracke des logiciels dans sa cave, de plus en plus d’entreprises franchissent le pas de la contrefaçon, au point que le piratage ferait presque figure de sport national en France !
Rien qu’en 2009, Microsoft a recensé plus de 150 000 signalements de logiciels contrefaits, à travers le monde ! Et selon le logiciel contrefait, la facture peut être salée pour Microsoft, tant le prix de certains logiciels peut se chiffrer à plusieurs milliers d’euros par licence. Si la contrefaçon de logiciels chez les particuliers est connue, elle ne constitue qu’en fait que la partie émergée de l’iceberg : car les entreprises ne se montrent pas toutes diligentes lorsqu’il s’agit d’acheter des licences pour chaque poste dans l’entreprise !
Les entreprises et les logiciels à la loupe
« Répandu », c’est le terme qu’emploie la BSA (Business Software Alliance), une association regroupant les éditeurs de logiciels, lorsqu’elle qualifie la contrefaçon de logiciels dans les entreprises françaises. C’est que les contrôles effectués en 2008 par la structure se sont révélés assez surprenants ! Selon le BSA, qui a effectué ces contrôles, une entreprise sur deux affichait un taux de logiciels piratés de 80%, c’est-à-dire que pour 5 logiciels installés sur un poste, 4 étaient en fait contrefaits ! Certaines des entreprises affichaient même un taux de piratage de 95% !
À titre d’exemple, en 2008, le taux de piratage pour les entreprises en France se situait autour de 41%. Forcément pour les éditeurs de logiciels, la facture est salée. Ainsi, en 2007, la contrefaçon de logiciels aurait entraîné un manque à gagner de plus de 1,77 milliard d’euros, rien que pour la France !
Quels moyens de contrôles ?
Des procédures d’installation de plus en plus exigeantes
Les éditeurs proposent des procédures d’installation du plus en plus longue et de plus en plus sécurisée pour lutter contre la contrefaçon de logiciels. Ainsi, les fabricants ne se contentent plus uniquement de demander la clé d’activation lors de l’installation du logiciel. Les éditeurs obligent plus les utilisateurs à re-renseigner leur numéro de licence et à enregistrer le logiciel sur le site de la marque afin de vérifier l’authenticité du produit. Cerise sur le gâteau : ils n’hésitent pas à resserrer les mailles du filet et à compliquer la tâche des utilisateurs qui souhaiteraient utiliser le logiciel indûment !
Des systèmes automatisés
pourtant, le risque de se faire pincer est de plus en plus grand pour les pros ! Pas vraiment décidés à laisser s’échapper le produit de leur travail, les éditeurs de logiciels n’hésitent plus à déployer de grands moyens et à imposer des contrôles réguliers d’authenticité du logiciel aux utilisateurs. Ainsi, depuis quelques années, Microsoft propose aux utilisateurs de ses logiciels de participer au programme Windows Genuine Advantage. Ce programme permet à Microsoft de vérifier que le logiciel, comme Windows Seven, par exemple est bien authentique et qu’il ne s’agit pas d’une contrefaçon. Dès le que Windows Genuine détecte une version contrefaite, il le signale à l’utilisateur via l’apparition d’une petite pastille dans la barre de tâches. Dès qu’un logiciel piraté est détecté, il est impossible à l’utilisateur d’effectuer des mises à jour de sécurité, ce qui peut se révéler fatal s’il s’agit du système d’exploitation !
La dénonciation a toujours la côte
Mais en matière de contrefaçon, c’est encore la dénonciation qui permet aux éditeurs de retrouver les entreprises qui utilisent leurs logiciels frauduleusement. Et les associations d’éditeurs n’hésitent pas à encourager la politique de la dénonciation dans les entreprises ! Ainsi, le SIAA (Software & Information Industry Association) n’hésite pas à proposer une prime à toute personne dénonçant l’utilisation de logiciels contrefaits dans une entreprise. Et la puissante association n’hésite pas à y mettre de gros moyens puisqu’elle propose à ses informateurs une prime pouvant aller jusqu’à plus d’un million de dollars (plus de 730 000 euros) selon l’information fournie !
Microsoft, via son programme Windows Genuine Advantage laisse aussi la porte ouverte à la dénonciation de contrefaçon, dont les entreprises peuvent aussi être victimes, via un formulaire sur son site.
Quels risques pour les entreprises ?
Dans tous les cas, l’utilisation d’un logiciel contrefait ou piraté peut coûter très cher à l’entreprise ou aux individus qui se rendent coupables de ce délit. Le BSA a par exemple calculé qu’en 2008, l’ensemble des procès intentés contre des entreprises situées en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique aurait coûté plus de 18 millions d’euros aux entreprises condamnées pour piratage, en additionnant les dommages et intérêts et le rachat de logiciels licites.
En France, le Tribunal de Bayonne a lourdement condamné le 14 décembre dernier un revendeur informatique, qui vendait des CD d’installation sans licence Microsoft. La cour l’a condamné à verser 27 761,49 euros en réparation du préjudice lié à la contrefaçon de marque, 5000 euros en réparation du préjudice résultant d’une pratique de concurrence déloyale, et 1500 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de la contrefaçon de la marque.
Mais le Code de la propriété intellectuelle prévoit des peines beaucoup plus lourdes en cas de piratage de logiciels !
Ainsi, les entreprises peuvent se voir condamnées à payer une amende de 300 000 euros, assortie de la fermeture totale ou partielle, définitive ou temporaire de l’établissement ayant servi à commettre l’infraction et de la confiscation du matériel ayant servi à commettre le délit.
Les entreprises « victimes » de piratage, qui utilisent des logiciels piratés sans le savoir, bénéficient en général de plus de clémence.
Et les logiciels les plus contrefaits sont…
Selon le SIIA, une autre association regroupant les éditeurs de logiciels, les logiciels bureautiques et les systèmes d’exploitation seraient parmi les plus piratés en entreprise. Ils représentent respectivement 34% et 23% des logiciels piratés en entreprises. Du côté des logiciels à proprement parler, l’étude du SIIA précise qu’en 2008, les antivirus Norton Symantec Antivirus, Symantec PC Anywhere étaient les plus piratés en entreprise dans le monde, suivis des logiciels phares d’Adobe : Acrobat et Photoshop ! Les entreprises semblent en fait contourner les lois lorsqu’il s’agit d’acquérir des logiciels coûteux à l’achat… ou en maintenance. L’achat d’un logiciel comme Adobe Photoshop CS4 peut par exemple se chiffrer à plus de 1000 euros… pour un poste. Si le prix des licences supplémentaires est dégressif, il n’empêche que l’achat d’un tel logiciel reste un investissement important… et que les chefs d’entreprises ne sont pas toujours prêts à mettre la main au portefeuille, surtout si elles estiment qu’elles n’en auront qu’un usage limité !