La créativité collaborative
J’étais à San Francisco pendant le temps des fêtes. Ce n’était pas ma première visite. Cela dit, c’est la première fois que je suggérais à ma petite famille d’aller faire un tour dans la Silicon Valley. Bon, la première réaction fut tiède. «OK, mais qu’est-ce qu’on va voir exactement? Des immeubles?» Réponse: «Euh, oui, en effet…» Je n’avais pas peaufiné mes arguments. Dans mon esprit, je voulais juste aller me balader dans la célèbre «vallée», histoire de ressentir la vibe, l’ambiance du coin. Après tout, c’est quand même ici que sont nés les grands de la techno et que se concocte l’avenir du numérique. Loin de me décourager, je suis revenue à la charge avec l’argument qu’il est possible de visiter le… Googleplex, le campus de Google. Tout à coup, l’intérêt fut plus marqué. Le mot «Googleplex», c’est quand même intrigant. Finalement, la petite troupe s’est dirigée vers Palo Alto, San Jose et Mountain View.
Alors en effet, les buildings s’alignent les uns après les autres. Cela dit, dans un joli écrin de verdure. C’est plutôt agréable, quoique les immeubles n’aient rien d’extraordinaire. Il se dégage toutefois autre chose. Une atmosphère, une énergie qu’on ne trouve pas ailleurs. Cela tient à des détails. Par exemple, en arrivant sur le campus de Google, il y a des vélos en libre-service aux couleurs de Google. Il y a aussi des terrains de sport et, pour brainstormer au grand air, des tonnes de chaises Adirondack (toujours aux couleurs de Google). Et puis, pour ceux qui ont une voiture électrique, le site offre des bornes de recharge équipées de leur propre panneau solaire. Plutôt élégant.
Tous les grands noms sont là: Apple, Facebook, Intel, Cisco… Réunies dans la même région, ces entreprises ont su attirer de gros capital-risqueurs qui les ont financées. L’ensemble de ces entreprises a créé tout un écosystème qui nourrit leur réussite.
Dans son dernier livre, Les Innovateurs, Walter Isaacson, l’auteur de la biographie de référence de Steve Jobs, explique d’ailleurs que la révolution technologique actuelle vient de la «créativité collaborative». La réussite n’est pas l’oeuvre d’une seule personne, comme semblent trop souvent le suggérer les biographies.
La réussite vient de la convergence de plusieurs éléments. Par exemple, «pour la naissance de l’ère numérique, il s’agissait d’un écosystème de recherche alimenté par les crédits gouvernementaux et géré par une collaboration triangulaire entre les militaires, les industries et les universités», explique-t-il. C’est comme cela qu’il s’est formé «une alliance informelle d’organisateurs associatifs, de hippies communautaristes, de bricoleurs et de bidouilleurs, de pirates et de hackers…» C’est avant tout cette rencontre de compétences, d’intérêt et d’énergie qui est à l’origine de l’innovation et de la création des grandes entreprises technologiques, affirme M. Isaacson.
Inspirons-nous de cette réflexion.
L’un des défis du Québec n’est-il pas de faire passer nos nombreuses petites PME au statut de grandes entreprises? Cette semaine, nous vous offrons une piste de réflexion en vous conduisant en Europe, au pays de Rovio et de Skype. Dans le même esprit, Les Affaires a lancé sur le Web «L’Observatoire de la croissance» (voir ici), un espace consacré aux dirigeants qui veulent passer à la vitesse supérieure.
Et parce qu’il est toujours bon de célébrer pour partager, notre site lesaffaires.com inaugure également «La PME de la semaine» (voir ici). Chaque jeudi, nous soulignerons le travail d’une PME (détails en page 4).
Belle manière de commencer l’année 2016. En passant, mes enfants ont finalement adoré leur visite de la Silicon Valley. Mon fils insistant même pour repartir avec un t-shirt flanqué non pas de la marque Google, mais de celle de sa filiale YouTube. Question de génération. Sur ce, bonne rentrée !